Pour les systèmes les plus simples, l'évolution consiste en général à tendre vers un état d'équilibre, c'est à dire que le systeme se stabilise petit à petit, ou vers une évolution périodique (comme la lune autour de la terre). Jusque dans les années 50/60, on pensait que les systèmes ayant un comportement aléatoire (c'est a dire "au hasard"), chaotique, imprévisible, étaient des systèmes qui dépendaient d'un très grand nombre (infini) de paramètres, comme la météorologie.
Au début des années 60, des scientifiques
de diverses diciplines, (May: biologie, Henon et Lorenz: meteorologie,
Smale : mathématiques,...) ont chacun dans leur domaine rencontré
des exemples de systèmes très simples, dépendant de
tres peu de paramètres, mais dont l'évolution semblait aléatoire,
imprévisible. C'est ce phénomène qui est connu médiatiquement
comme "théorie du chaos", avec sa faune d'"attracteurs étranges"
de "fractales".
Dans les années 70, des mathématiciens
ont montré que les systèmes chaotiques "les plus simples"
avaient une très bonne description à l'aide des probabilités.
Cela veut dire que, si l'on ne peut pas prédire comment aura évolué
le système à une date donnée, on peut prédire
son comportement statistique, les marges d'erreurs, etc...Les systèmes
déterministes sont alors décrits comme des systèmes
aléatoires (type "pile ou face" ou "tirage de dés")!
L'un des enjeux actuel de la recherche en Systèmes Dynamiques est de déterminer si cette bonne description des Systèmes Chaotiques à l'aide des Probabilités est un phénomène général, ou si au contraire cette approche ne voit que les Systèmes Dynamiques les plus simples.
Mes travaux (avec Lorenzo Diaz et Marcelo Viana, chercheurs à
Rio de Janeiro), tentent de caractériser géométriquement
les Systèmes Dynamiques qui ont une évolution bien décrite
par les probabilités:
--- Nous avons montré qu'un tel système doit présenter
une forme affaiblie d'hyperbolicité (appelée "hyperbolicité
partielle" ou "décomposition dominée").
--- Nous cherchons actuellement à déterminer si (réciproquement)
l'hyperbolicité partielle est suffisante pour assurer le bon comportement
probabiliste: nos résultats (partiels) vont dans ce sens.
Faire une opération pour calculer vos impots, ce n'est pas faire des mathématiques: c'est appliquer une recette de cuisine...Par contre les inventeurs de cette recette millénaire ont fait, un instant, des mathématiques. L'histoire ou la légende disent que la géométrie est née de la difficulté de redonner équitablement des champs, après les crues du Nyl: mesurer la surface d'un champ , ce n'est pas faire des mathématiques. Par contre, les découvreurs des lois permettant de calculer l'aire d'un rectangle ou d'un trapèze, ceux-là ont fait des mathématiques!
Dans beaucoup de domaine des sciences, on cherche à prévoir une évolution à long terme. Pour cela il faut d'abord donner "une description complète" du système, c'est à dire de mesurer des grandeurs (température, pression, position, vitesse) qui sont sensées déterminer l'évolution future. L'état du système, c'est la donnée de ces valeurs: c'est donc un ensemble de nombre.
Le scientifique doit alors trouver la loi d'évolution du système:
c'est à dire que, étant donné l'état du système
au temp 0, il faut pouvoir déterminer quel sera son état
au temps 1. S'il réussi a déterminer la loi d'évolution
on se dit : " c'est gagné! On peut prédire l'évolution!"
...Ben oui, quoi: pour avoir l'état du système après
deux jours, yacca appliquer deux fois la loi d'évolution! Et puis,
ainsi de suite quoi!
Si vous me permettez une petite formule...
Utilisons la lettre x pour représenter l'état du système
au temps t, et F pour représenter la loi d'évolution.
L'état au temps t+1 est F(x).
Au temps t+2 ce sera F(F(x)).
Au temps t+3 ce sera F(F(F(x)))
Au temps t+25 ce sera donc F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(F(x)))))))))))))))))))))))))...Essayez
donc pour voir de demander a votre ordinateur préféré
de me calculer cela, quand x est un nombre réel, et F est
la gentille fonction
F(x)= -x.x +1. (désolé, je ne sais pas faire les exposants
en .html)
Mais ce n'est pas t+25 qui nous interesse, c'est l'état du système
l'an prochain!
En général, ce n'est pas possible de donner la loi d'évolution à long terme (l'an prochain, pour l'exemple ci-dessus), et de toute façon, cela ne servirait sans doute a rien: la plus petit erreur sur l'état initial x ou sur la loi F, et la prévision serait complètement fausse!
Le mathématicien qui fait des systèmes dynamique ne cherche pas à prévoir l'évolution d'un système particulier: il cherche les méthodes que pourront utiliser les autres scientifiques pour que chacun sache quoi faire, ou a quoi s'attendre, quand il doit décrire l'évolution à long terme d'un système particulier. La réponse est souvent "géométrique" et c'est pour cela que les Systèmes Dynamiques ont pu me séduire:
En mathématique, un ensemble de nombres représentent un point dans un espace géométrique: un nombre, c'est un point sur une droite, deux nombres, c'est un point sur un plan, trois nombres c'est un point dans l'espace, 250 nombres c'est un point d'un espace de dimension 250.
Prenons le cas d'un espace des états qui serait de dimension
2. Une loi d'évolution est alors une transformation du plan.
Dans ce plan, certaines courbes seront importantes: celles qui sont invariantes
par la transformation. Le dessin de ces courbes permet de structurer l'étude
de la dynamique.
Au début du sciecle, Poincaré s'est aperçu que
certains dessins avec des courbes invariantes qui se croisent impliquait
un dynamique très complexe: par exemple Birkhoff dans les
années 30 avait montré que ce simple dessin impliquait l'existence
d'une infinité d'états périodiques dont le période
tendait vers l'infini !
Le dessin de Poincaré a trouvé son explication dans un
autre dessin, le "Fer à Cheval" de Smale, dans les années
50/60, qui est à la base de la théorie des systèmes
chaotiques hyperboliques.